Résumés du numéro 15 de la revue

 Al. Istighrab

Le numéro 15 de la revue al-Istighrab porte sur la question de la technique; il réunit des articles qui cherchent à approcher ce thème et rendre compte de ses principaux problèmes.

Dans la rubrique "Avant-propos", le rédacteur en chef Mahmoud Haïdar écrit un article intitulé "Idole de technologie et culte de l'objet". L'objectif de cet article est d'étudier une stratégie d'enracinement de la technique pour dégager son origine métaphysique. Il considère le phénomène de la technique comme une simple réduction de la vérité par les sens, après la séparation opérée par la modernité entre la réalité et la métaphysique. La technique devient alors une idolâtrie dominante au monde.

Dans la rubrique "Entretiens", on lit un entretien avec le professeur Asghar Taher Zada. Il traite des questions centrales liées au progrès technologique. Il répond également aux questions qui visent à organiser le lien entre l'homme et la technique, et examine la dialectique entre les sciences occidentales et la science religieuse.

Dans le "Dossier", on trouve les études et articles suivants:

-Sous le titre "Technophilie et technophobie, quelle critique possible?" le chercheur français Marc Grassin aborde la question de la technique. Cet article met en évidence la technique, supposée intrinsèque du premier mouvement de l'humanité qui est inspirée par elle. La recherche débouche sur le fait que l'aspiration à une technique centrale et humaniste, instrumentalisée par l'homme semble sombrer dès qu'on comprend la vérité de la subjectivité admise par le libéralisme contemporain.

-sous le titre "La technique est origine", la chercheure égyptienne Safaa Abdessalam Ali Jaafar présente une nouvelle lecture de l'essai de Heidegger "La question de la technique". Cet article s'applique à lever certaines ambiguïtés sur la technique dans la mesure où Heidegger part de la question de la technique jusqu'à celle de l'existence, pour établir ensuite un rapport libre avec la technique.

-les deux chercheurs iraniens Mohçen Chirawand et Amine Azimi ont écrit un article intitulé "Ethiques de la créativité technique". Ils lancent une discussion sur la problématique du rapport non équivalent entre l'origine de l'homme et sa fin d'une part, et la technologie et la technique de l'information d'autre part. Ils prennent pour base la thèse de deux dimensions fondatrices, la dimension métaphysique de l'homme et la dimension physique unique de la technologie. Ils abordent les disciplines établies par l'anthropologie religieuse et opinions philosophiques.

-le professeur de la philosophie allemande Mouchir Bassil Aoun écrit un article intitulé "La technique moderne, fruit de la raison métaphysique occidentale". Le chercheur approche la question technique en tant que phénomène majeur de la métaphysique moderne, et synthèse de la raison métaphysique instrumentale. Pour lui, les lectures de Heidegger constituent un champ cognitif où l'approche impose un contexte inductif. Les incohérences du lien entre les composants principaux sur lesquels la raison métaphysique occidentale s'appuie, apparaissent alors: l'être, les êtres vivants et l'homme. L'essayiste cherche à dévoiler les dimensions ontologiques de la technique de manière telle que l'étude déboucherait sur la compréhension de l'influence profonde et destructrice exercée par la technique sur la réalité humaine contemporaine.

-"La biotechnologie" est le titre de l'étude de Ronald Cole Turner, professeur agrégé de théologie et de bioéthique à l'Université de Pittsburgh. Il traite la biotechnologie contemporaine, son développement et l'extension de ses applications. Cela porte à une contestation d'ordre théologique et des critiques passionnées en confrontation avec les démarches de l'expérience génétique et les résultats qui en découlent.

-le chercheur égyptien Haçan Hammad écrit un article intitulé "L'aliénation technique".  L'article traite les effets catastrophiques de la nouvelle technique, en particulier le fait que l'homme se trouve incapable de dominer et se sent alors dépendant, notamment après la torsion du contexte de la modernité, où l'homme se confronte à des grands défis après le surplus technique des dernières décennies.

-sous le titre "La théorie critique de la technologie", le philosophe américain Andrew Feenberg condense les idées principales de la théorie critique de la technologie. Il cherche ensuite à montrer le lien qui lie la technologie et ses deux sources: la théorie critique adoptée par l'école de Franckfort, et les efforts primaires des études de la science et la technologie.

-le penseur soudanais Omar al-Amine Ahmad Abdallah écrit une étude intitulée "L'avenir numérique de l'Occident" en reprenant le cadre de référence théologique et idéologique sur lequel la civilisation européenne technique consiste. Dans cette reprise, le chercheur souligne les origines non culturelles de l'Europe et montre sa dimension barbare et l'influence profonde qui en découle. Il voit la technique comme un résultat historique de cette dimension. Cela est confirmé par les faits de l'Âge moderne, en particulier le déclin de la structure éthique de l'Occident.

Dans les cercles de débat, on lit:

-Sabrine Zaghloul Assayed, spécialiste de philosophie de la religion, a réalisé une étude intitulée "La technique et la solitude". Il est question de la technique en tant que aspect de l'œuvre du philosophe russe Nikolai Alexandrovich Berdyaev qui vise à transformer l'esprit de la créativité technique en une époque spirituelle destinée à réaliser des fins humaines, plutôt que d'être un phénomène pour promouvoir l'aliénation de l'homme vis-à-vis de lui-même et de sa société.

-le professeur de philosophie contemporaine Ghidhan Assayed Ali écrit un article intitulé "Atteintes techniques au sacré". Il y dénonce les résultats des applications techniques dans ses différents domaines. Il part de la place éminente accordée par Dieu à l'homme, et montre les atteintes massives à l'humanité à la suite de l'invasion actuelle technique.

-sous le titre "Bioéthique, technique et mutations contemporaines", le chercheur irakien Amer Abed Zaïd al-Waeli approche les changements décisifs qui ont produit ce qu'il nomme "Âge de fin des espoirs philosophiques en matière du lien entre la science, la technique, la politique et la bioéthique". Sa vision est basée sur celle du philosophe allemand Jürgen Habermas qui s'intéresse à la critique de la raison technique, en adoptant des conceptions basées sur une théorie d'éthique de communication plutôt qu'une éthique instrumentale, et met en garde contre l'influence de l'Etat libéral, pour conduire la nature humaine à une époque plus libre vis-à-vis du despotisme technique.

-le chercheur égyptien Adel Abdessamii Awad aborde le problème de la technique, à l'époque de la modernité et la post-modernité, en tant que contexte dominant la vie de l'individu et des communautés de la société occidentale, notamment le flux énorme des informations et la guerre virtuelle qui a exercé une influence profonde sur la structure institutionnelle et étatique. L'objet de l'étude est de traiter les crimes informatiques du point de vue philosophique et sociologique, y compris celui de Hans Jonas.

-"Problème du progrès technique" est le titre de l'article écrit par Fatima Ismael, chercheuse en philosophie des sciences. Elle y illustre l'aspect méthodologique en tant que moment constitutif du progrès scientifique, et outil principal de transformation du savoir. Elle vise à traiter la méthodologie de recherche de Lodan, Conn et Lacatouch, pour clarifier directement le continuum du progrès scientifique historique.

Dans la rubrique "Forum de l'Istighrab" on trouve un entretien intitulé "Techniques du présent", entre deux philosophes français. L'entretien se déroule à Strasbourg le 4 octobre 1998 entre Jean-Luc Nancy et Benoît Goetz. La discussion cible un éventail de thèmes relatifs à la technique et ses champs d'application. Les questions abordées relèvent de la technique, l'art et l'influence de la nature sur ces deux concepts; les deux interlocuteurs ont également évoqué d'autres sujets comme l'art, le travail, le chômage, le nihilisme et la nature qui révèle le rôle de la technique dans tous ces domaines. Cela a pour conséquence la naissance d'un homme technophile.

Dans la rubrique "le monde des notions" on lit une étude intitulée "Le concept, son sens, ses significations et ses usages". Cette étude met en lumière le concept de technique et ses significations linguistiques et terminologiques, ainsi que ses usages dans les sciences et les cultures modernes. Le chercheur Khodhor I. Haïdar traite les notions principales et les concepts dérivés relatifs à la technologie, le développement, le progrès et les sciences empiriques, ainsi que les techniques produites par l'expérience humaine moderne, notamment les nano-technologies, les médias et le clonage, etc.